La Morsure, La boum version gothique

S’il apparait un peu moins confidentiel qu’il y a quelques années, le cinéma de genre français fait souvent à défaut de moyens preuve de créativité comme l’a démontré Grave de Julia Ducournau. En quoi la sortie en salle ce mercredi 15 mai de La Morsure premier film de Romain de Saint-Blanquat mérite elle le détour ?
Pensionnaire d’un lycée catholique dans les années 60, Françoise est traumatisée par un cauchemar dans lequel elle se voit bruler vive. Persuadé qu’il est prémonitoire et qu’il lui reste plus qu’un jour à vivre elle convainc sa meilleure amie Delphine de la suivre afin de vivre le plus intensément possible sa dernière soirée.

Premier long métrage de Romain de Saint-Blanquat, la Morsure a été tourné en partie au Studio Prisma à Entrammes, au collège de Combrée à Ombrée d’Anjou et au château de Danne à Segré-en-Anjou Bleu. Il a logiquement reçu en partenariat avec le CNC une aide à la production de la Région des Pays de la Loire.
Souvent utilisé au cinéma comme parabole à la perte de la virginité, le mythe du vampire dans la Morsure est mis en scène avec des protagonistes directement concernés puisqu’il s’agit d’adolescents. Également scénariste du film, le réalisateur brouille toutefois habillement les pistes avec l’intervention d’un adulte.

Il a aussi contextualisé l’action à l’époque conservatrice des années 60, dans une école catholique afin d’amplifier le besoin pour son héroïne de changements, de transgressions voire de transcendance. Le choc entre l’âge et cette période instille rapidement le sentiment qu’il va se passer quelque chose d’important.

La Morsure méritait sa place même hors compétition au 31eme festival de Gérardmer. Outre le thème, la photographie rappelle celles des classiques de la Hammer avec des cadrages serrés, un éclairage privilégiant les visages et des décors à l’esthétique expressionniste via un jeu travaillé d’ombres et de lumière.
Bien qu’il ait filmé en numérique, de Saint-Blanquat pour renforcer l’immersion a utilisé le format d’image 1.66:1 en vogue pour la majorité des films de la Nouvelle Vague. Il est aussi parvenu à obtenir un grain argentique avec une grammaire de couleurs très françaises à base de bleu de blanc et évidemment de rouge.
Malgré des dialogues châtiés tout en étant emprunts d’une certaine modernité, le casting est convaincant. Par ses multiples facettes le jeu de Léonie Dahan-Lamort qui incarne Françoise se démarque toutefois tant il est hypnotique. Heureusement Maxime Rohart dispose d’un charisme à la hauteur pour donner la réplique.

Faire appel à Emile Sornin pour la bande son de La Morsure sonne comme une évidence. Influencé par Cosma, de Roubaix et Jean-Claude Vannier, le fondateur du projet Forever Pavot en combinant flute traversière, guitare, clavier et voix délivre une musique qui s’accorde parfaitement avec l’ambiance du film.
Avec la Morsure, Romain de Saint-Blanquat a fait preuve d’un perfectionnisme exalté et d’un sens aigu du détail. Il en résulte une œuvre sensible, esthétique avec des dialogues atemporels et un casting prometteur pour un premier long. Après cette boum version gothique, sa carrière mérite d’être suivie avec grand intérêt.


La Morsure
En salle le 15 Mai 2024

Silverword Auteur

Critique de Cinéma, Spécialiste High Tech, Gameur old School, le Triangle Infernal

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