Mickey 17, démonstration roborative de la bêtise humaine
Silverword
L’événement ciné de ce début d’année était incontestablement l’avant-première de Mickey 17 au Pathé Palace. Son réalisateur Bong Joon Ho, accompagné de Toni Collette, Mark Ruffalo et une bonne partie de l’équipe du tournage ont fait le déplacement pour répondre à quelques questions posées par le club Allociné. Afin d’échapper à un impitoyable créancier, Mickey s’engage sur un vaisseau en partance pour une planète à coloniser. Servant de cobaye quitte à en mourir, il est reconstitué à chaque décès, sa mémoire étant préservée. Avec aucun doublon autorisé, sa 17eme itération en échappant à la mort est en fâcheuse posture. Mickey 17 est l’adaptation cinématographique du roman Mickey7 d’Edward Ashton chercheur et enseignant américain en physique quantique. Il existe une suite directe se déroulant 2 ans après les événements du livre qui s’appelle Antimatter Blues mais rien à ce jour ne laisse à penser qu’elle sera aussi portée à l’écran. La science-fiction a souvent été utilisée pour dénoncer de manière implicites les dérives de sociétés bien contemporaines. A ce titre, Mickey 17 s’inscrit totalement dans cette lignée. L’Amérique est ainsi clairement visée notamment son président actuel avec ses velléités d’impérialisme et sa façon spécifique de gouverner. La thématique de l’immortalité de l’homme grâce à la technologie et des problèmes éthiques qu’elle pourrait soulever est certes évoquée mais sans être explorée en profondeur. Si la satire est en premier lieu politique, le scénario n’échappe pas au florilège de canevas qui sont en vogue concernant le féminisme et l’écologie. Il n’est donc pas étonnant de trouver un couple présidentiel cabotin à souhait joué par Mark Ruffalo et Toni Collette, une héroïne noire dans la toute-puissance y compris sexuelle incarnée par Naomi Ackie et naturellement un male beta mais fervent défenseur de la cause animale bien interprété par Robert Pattinson. Sans être renversants, les effets spéciaux s’avèrent corrects. Bong Joon Ho a confié durant le Q&A que le design des créatures était inspiré par la forme d’un croissant. La photographie en revanche est remarquable avec un rendu typique des environnements de cargo et des couleurs ternes pour jouer sur les contrastes. Le réalisateur a aussi confié être daltonien ce qui explique l’existence de versions en noir et blanc pour Mother et Parasite. Il a souligné l’importance de la couleur menthe à l’intérieur de l’imprimante d’où sort Mickey et la confusion entretenue entre le sang, la sauce et le costume porté par Toni Collette en fin de film. Bong Joon Ho s’inscrit dans la continuité en faisant appel à Jung Jae-il pour composer la musique de Mickey17. Primé au Hollywood Music in Media Awards pour Squid Game, brillant dans Sea Fog et familier des gouts du réalisateur après Okja et Parasite, il délivre pour la 3ème fois une excellente bande son. Typique de son réalisateur, Mickey 17 est un film plus politique que fictionnel. Il pousse la satire à l’extrême privilégiant un surjeu de la plupart des acteurs pour une démonstration roborative de la bêtise humaine. Elle s’effectue au détriment du développement des personnages et de la dimension philosophique du roman.